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[Vers un Aménagement
Durable des Forêts
]

 


Plantations et Restauration  de Terres Dégradées


 

les reboisements, notamment sur les sols dégradés ou de faibles potentialités, sont un sujet majeur de recherche du CIFOR, en raison de la nécessité de satisfaire l’énorme demande mondiale de bois d’oeuvre, de pâte à papier et autres produits ligneux. Une grande partie de ce travail concerne l’optimisation de la productivité des forêts artificielles.

Le grand problème pour les forestiers, les chercheurs et les industriels est de faire des reboisements qui soient à la fois économiquement viables et biologiquement stables. On y parvient déjà dans de nombreux pays industrialisés, mais pour de nombreux pays tropicaux le reboisement est une chose relativement nouvelle, et on ne sait que peu de chose sur les conditions locales et sur les handicaps qui peuvent limiter les rendements – faibles niveaux d’humidité et d’éléments nutritifs dans le sol, érosion, hétérogénéité génétique, mauvaise préparation du sol, par exemple.

Sous la direction de Christian Cossalter, expert en reboisement des terres marginales, le CIFOR s’est engagé dans un certain nombre d’études à travers le monde, dans le but de rassembler une information sur le terrain qui aidera à améliorer la fertilité du sol et à accroître la productivité des plantations forestières sur plusieurs générations successives.

En 1998, des expérimentations sur le terrain se sont poursuivies sur 16 parcelles réparties entre sept pays – Australie, Brésil, Chine, Congo, Inde, Indonésie, Afrique du Sud – dans un projet qui a pour objet de déterminer les meilleures méthodes d’exploitation des reboisements dans les pays tropicaux dans une large gamme de conditions écologiques. Les résultats aideront les gestionnaires forestiers à choisir les meilleures stratégies pour corriger les problèmes de productivité sur chaque site particulier, et devraient s’appliquer également aux plantations forestières en général.

Parmi les sites étudiés, on trouve les plantations d’eucalyptus de faible rendement en Chine et en Inde. Les boisements artificiels d’eucalyptus sont une des principales sources de bois et de pâte pour répondre à la demande intérieure et inernationale. Mais les rendements sur les sites expérimentaux en Chine et en Inde sont nettement au-dessous de la moyenne pour cette essence. Les chercheurs expérimentent divers traitements qui, espèrent-ils, remédieront à ce problème.

Dans le même temps, des expériences analogues lancées en 1998 fournissent une base pour l’étude de "critères et indicateurs" pouvant servir de guides pour la gestion des plantations de manière à maintenir ou accroître leur productivité. Un autre instrument à l’étude pour aider à la gestion des reboisements est une approche prometteuse qui combine les systèmes d’information géographique (SIG) et les systèmes d’agents multiples (SAM). En définitive les gestionnaires forestiers devraient être à même d’élaborer des modèles de plantations pour étudier les interactions des plantations forestières avec d’autres ressources naturelles et avec la population locale, ce qui facilitera les décisions relatives à l’aménagement des paysages.

Bien qu’occupant des surfaces nettement délimitées, les reboisements n’en sont pas moins des éléments de paysages plus vastes. Cela soulève d’importantes questions au sujet de l’influence qu’ils peuvent avoir sur des écosystèmes plus vastes. Par exemple, de quelle manière les plantations agroforestières influent-elles sur la biodiversité ? Les plantations forestières établies à proximité d’aires protégées constituent-elles une menace pour la flore et la faune indigènes, en facilitant l’introduction d’autres espèces généralistes ou exotiques ? Le CIFOR étend ses travaux aux plantations forestières afin de répondre à des questions telles que celles-ci.

La restauration de terres forestières dégradées peut présenter un intérêt commercial, tout en procurant d’importants bénéfices écologiques. La régénération suppose que l’on remédie à des problèmes tels que perte de fertilité du sol, effets de l’érosion et perturbation du bilan hydrique et autres fonctions écologiques. Les solutions comprennent une diversité de pratiques telles qu’accélération de la régénération naturelle, plantations d’enrichissement, changement de la durée de révolution, plantation d’essences à croissance rapide, emploi de matériel génétique amélioré, réduction des dégâts d’exploitation forestière, constitution de plantations mixtes associant essences à croissance rapide et essences d’ombre.

Les études du CIFOR sur les terres dégradées s’étendent au monde entier, et englobent une large gamme de types de forêt. Le Japon a fourni des fonds importants pour ce programme, qui est coordonné par Shigeo Kobayashi.

Un axe important de recherche concerne les techniques sylvicoles propres à améliorer les terres forestières dégradées. Une étude menée conjointement avec l’Université Kasetsart en Thaïlande, par exemple, a pour objet d’évaluer les effets écologiques des éclaircies dans les plantations de teck selon divers dispositifs et avec différentes intensités, et les effets de plantations intermédiaires de caféier par exemple. Dans une autre étude sur les reboisements, on a conduit en 1998 des expérimentations sur deux plantations d’eucalyptus âgées de 7 ans dans l’Etat de São Paulo au Brésil, appartenant à des usines papetières. Organisée conjointement avec EMBRAPA/CNPF, cette étude évaluera les effets du tassement du sol lors de l’exploitation et des méthodes de labour sur la productivité de la station. Les conclusions auront une large portée, parce que les boisements d’eucalyptus représentent près de 40 pour cent de toutes les plantations forestières au Brésil, avec quelque 400 000 hectares dans le seul Etat de São Paulo.

En partenariat avec des chercheurs chinois, des chercheurs du CIFOR étudient des approches socio-économiques susceptibles d’aider aux vastes efforts en vue de restaurer les terres dégradées. Les terres dégradées situées en zones montagneuses représentent plus de 60 pour cent du territoire de la Chine, et il est très nécessaire d’encourager une utilisation productive de ces terres, notamment par les petits agriculteurs. La plantation d’arbres est une solution qui jouit d’une grande faveur, mais on se préoccupe de la viabilité à long terme des reboisements sur ces terres. L’Académie forestière de Chine a proposé un certain nombre de solutions techniques, mais un problème majeur est la manière d’appliquer ces techniques à grande échelle et d’une manière appropriée à une zone donnée.

Malheureusement, la recherche forestière en Chine, comme dans d’autres pays, est souvent entravée par un manque de données. L’information disponible sur les ressources forestières peut être hétérogène et de qualité inégale, et les méthodes couramment employées pour la rassembler peuvent conduire à des interprétations inexactes. En 1998, les chercheurs du CIFOR ont poursuivi leur collaboration avec plusieurs institutions de Chine et d'Indonésie en vue d’améliorer leurs méthodes de collecte de données forestières, afin d’en faciliter une analyse plus rigoureuse. Après avoir fait le bilan des données statistiques existantes dans les organismes forestiers des deux pays, ils ont commencé à synthétiser et analyser les résultats et à formuler des recommandations en vue d’un colloque sur la question qui se tiendra en mai 1999 à Pékin.